Début Aout 2024, un dimanche aux environs de 15 heures à l’Autogare de Wadata à Niamey, Issa Hinsa Adamou, un homme d’une trentaine d’années, était adossé au minibus à bord duquel il s’apprêtait à quitter la capitale pour Konni. Il était visiblement préoccupé. « Ce n’est vraiment pas facile d’emprunter la route sans pièce d’identité, à chaque poste de police on te ferait descendre du véhicule et tu es obligé de payer quelque chose pour continuer le voyage », a confié Issa Hinsa Adamou, sur un ton plaintif. « On te fait une contravention de 1.500 FCFA valable un seul jour. Ainsi, si tu as payé la contravention en allant, tu risques d’en payer une autre au retour. A défaut de payer la contravention, tu paies au moins 500 FCFA, mais avec le risque de continuer à payer à chaque poste de police », a-t-il expliqué. « Si on n’a pas assez d’argent, c’est un autre problème ! », s’est exclamé le voyageur, en connaissance de cause.
En effet, Issa Hinsa Adamou a ensuite confié qu’il ya une dizaine de mois, il avait vécu l’amère expérience de voyager sans carte d’identité, et avec les poches vides, lorsqu’il se rendait à son village, vers l’Est du pays. Il y avait une urgence, son voyage a été improvisé. « La date de validité de ma carte d’identité était expirée d’environ trois mois, je ne l’avais pas renouvelée, j’attendais l’approche de mon retour à la maison pour prendre une nouvelle pièce d’identité lorsque le voyage m’a surpris et malheureusement, je n’avais pas assez d’argent sur moi », a rapporté Issa Hinsa Adamou. « Ce jour-là, au niveau de presque tous les postes de contrôle, l’agent de police me fit descendre du véhicule. Comme je n’avais pas de quoi payer pour l’infraction, j’étais obligé de les supplier pour qu’ils me laissent partir, notre conducteur avait dû intervenir souvent pour que les policiers acceptent de me libérer », a-t-il poursuivi. « Dès que je reviens reprendre ma place dans le véhicule, les passagers braquent leurs regards réprobateurs sur moi et cela me gênait fortement, j’en avais honte, j’en avais très honte. Moi-même, j’étais conscient que je leur faisais perdre du temps », a-t-il ajouté. « Quant au conducteur, un moment il avait carrément avoué que s’il savait, il ne me prendrait pas dans ces conditions, car je ralenti le voyage à passant du temps à négocier les policiers », a amèrement laissé entendre le voyageur.
Cette fois-ci, Issa Hinsa Adamou a l’intention de se rendre jusqu’à Konni sans carte nationale d’identité, il s’inquiète déjà de l’inévitable contrôle d’identité au niveau de la sortie de Niamey. Il y a aussi les postes de police de Margou, Séty et Dosso, Doutchi et Konni où on s’intéresse également à l’identité des passagers, selon Issa Hinsa Adamou.
Pour ce qui dans leurs voyages franchissent les frontières du pays sans les pièces d’identité requis, les tracas deviennent beaucoup plus compliqués. Selon Karimou Saley, un voyageur rencontré dans une compagnie de transport de la place, et qui avait l’habitude d’aller en exode à Cotonou au Bénin et à Lomé au Togo, lorsque la frontière entre le Niger et le Bénin était ouverte, en dehors des contrôles qu’on subit à l’intérieur de notre pays, il y a d’autres plus rigoureux au niveau des deux postes frontaliers. « Pour franchir la frontière d’un autre pays que le sien, la simple carte d’identité ne suffirait pas, il faut également un passeport, sinon on risque d’être racketté à volonté au niveau des postes frontaliers », a affirmé Karimou Saley. J’ai l’habitude de payer pour cela aux postes juxtaposés de Malanville et à Hilakondji à la frontière entre le Bénin et le Togo.
De son côté, Moctar Moussa a souligné la rigueur qui caractérise les agents burkinabé en matière de contrôle d’identité des voyageurs. « De la frontière entre le Niger et le Burkina Faso à celle qui sépare ce pays et la Côte d’Ivoire, le voyage serait sans doute amer pour celui qui n’a pas les pièces d’identité exigés », a-t-il averti. « D’ailleurs au Burkina Faso, quand un agent de police te dit de payer une amende pour manque de pièce d’identité, c’est irréversible. Lorsqu’on se hasarde à demander une réduction, la somme initialement prévue serait doublée et on est obligé de la payer », a souligné Moctar Moussa. « Pour ce qui est de l’intérieur de la Cote d’Ivoire, n’en parlons même pas ; de Oungolodougou (ndlr : localité ivoirienne située à une trentaine de kilomètres de la frontière burkinabé) à Abidjan, il y a tellement de postes de contrôle de voyageurs que je n’ai jamais réussi à les compter », a-t-il indiquer.
Pour Ali Hassane, il n’est pas question de se rendre où que ce soit sans pièce d’identité. « Avant même de quitter ma maison, je vérifie si j’ai mes pièces d’identité sur moi, parce moi je trouve humiliant de se faire descendre d’un véhicule pour manque de carte nationale d’identité, même si on a de quoi faire face aux raquettes que cela entraine. « Par ailleurs, la carte nationale d’identité est obligatoire pour le citoyen à partir de 18 ans, donc ne pas en avoir à mon âge, c’est manquer à un devoir civique », a-t-il conclu.
Notons que l’acte de naissance est un document indispensable non seulement à l’obtention des autres actes d’Etat-civil, mais aussi du certificat de nationalité, de la carte nationale d’identité et du passeport, entre autres. Ces différents documents reprennent l’identification mentionnée sur l’acte de naissance de l’acquéreur, d’où la nécessité de se procurer cette pièce fondamentale d’Etat-cil à temps.
Boubacar Hamani LONTO